Afrique Centrale - Afrique de l'Ouest

Le 07 janvier 2009

Aimé D. MIANZENZA, Cesbc

 

Les chemins divergents de l'essor  de la société civile

 

" Qui dit pouvoir dit aussi responsabilisation. Le peuple doit non seulement avoir son mot à dire sur les décisions officielles, mais aussi être en mesure de demander des comptes à ces dirigeants."

PNUD, Rapport sur le développement humain 2000,

Bruxelles, De Boeck Université, page 65.

La société civile est devenue un acteur majeur du développement. Sa taille, son champ et sa capacité d’action n'ont cessé de prendre de l'importance au fil des années, à la faveur de l’expansion de la gouvernance démocratique à l’échelle mondiale. Son influence a été renforcée grâce au succès des campagnes de sensibilisation menées par des centaines d’organisations non gouvernementales de par le monde, regroupées au sein de diverses plateformes et mobilisant des milliers de citoyens autour de questions telles que l’annulation de la dette, la protection de l’environnement, le contrôle du commerce des armes, Publiez ce que vous payez (PWYP), l'Initiative sur les industries extractives, Paradis fiscaux et judiciaires, etc.

En Afrique subsaharienne, l'essor de la société civile est concomitant à la fin des régimes de parti unique et du contrôle qu'il exerçait sur toutes les formes d'organisation sociale. Suite à la crise économique, au désengagement de l’Etat de nombreux secteurs sociaux, à la mauvaise gouvernance, à la gestion néopatrimoniale des ressources nationales, à la corruption, etc., la société civile a commencé à investir les espaces laissés vacants par la puissance publique.

En Afrique de l'Ouest les autorités ont fini par considérer les organisations de la société civile (OSC) comme des partenaires, on l'a vu avec les manifestations contre les Accords de Partenariat Économiques (APE) en 2008 et dont un des moments forts a été la Marche sur Bruxelles le 11 janvier 2008. En Afrique centrale, la position des pouvoirs publics est en déphasage par rapport à une évolution devenue irréversible. En Angola, au Congo-Brazzaville, au Gabon, en Guinée Équatoriale, au Tchad (tous pays producteurs de pétrole), après avoir réduit l'opposition politique au rang de succursale des partis au pouvoir, notamment par l'achat des consciences, la position par rapport à la société civile est désormais l'élimination de toute velléité d'indépendance de la part des OSC. Les pouvoirs ne veulent pas entendre parler de la création d'un espace de subsidiarité ouvrant la possibilité d'instituer des niveaux de pouvoir autonomes par rapport à l'Etat, mais reconnus par lui.  Les animateurs des organisations qui n'acceptent pas de se soumettre  sont ainsi de toutes sortes d'intimidations, de tracasseries ; si nécessaires, ils sont incarcérés.

Au Congo-Brazzaville, Brice Makosso et Christian Mounzéo de la Plateforme Publiez ce que vous payez ont été poursuivis par les autorités de leur pays en raison de leur appartenance à la plateforme ; ils ont connu des procès et la prison.

Au Gabon, les autorités viennent d'interpeler  Grégory Gbwa Mintsa (plaignant dans l’affaire des biens mal acquis en France), Marc Ona Essangui, (Coordonnateur de Publiez Ce Que Vous Payez - Gabon et Président de l’ONG Brainforest), Georges Mpaga (Président du Rolbg), Gaston Asseko (Journaliste, directeur technique à Radio Sainte-Marie), Léon Dieudonné Koungou (du journal Tendance Gabon), Bruno Ben MOUBAMBA (Porte-parole des Acteurs Libres de la Société Civile Gabonaise). Par ailleurs, les bureaux de Publiez ce Que Vous Payez - Gabon et de l’ONG Brainforest ont été saccagés et les ordinateurs volés.

Les OSC sont dans une démarche responsable face à l'arrogance des dirigeants insensibles aux souffrances qu'endurent leur peuple. Les dirigeants des pays d'Afrique centrale doivent comprendre que les OSC sont aujourd'hui des acteurs incontournables avec lesquelles il est indispensable d'établir un dialogue franc et constructif sur les sujets qui intéressent le développement économique et social de l'Afrique Centrale comme cela se fait en Afrique de l'Ouest.

Copyright @ 2006-2012 Centre d'études stratégiques du bassin du Congo   -   Tous droits réservés