Noël KODIA

Une situation qui devrait interpeller les gouvernants

 

Une situation qui devrait interpeller les gouvernants ainsi que les acteurs du monde éducatif de la région dans la mesure où l’université contribue énormément au développement d’un pays par l’intermédiaire de la recherche au niveau des sciences humaines et exactes.

Une remarque pertinente sur ce classement : la grande présence des universités anglophones qui pourrait être synonyme de suprématie du système éducatif anglo-saxonne sur celui des Francophones.

Une université se respecte par la notoriété de ses enseignants et la pertinence de ses travaux de recherche. Mais dans certains pays où sont passées la mauvaise gouvernance sur fond de népotisme et les guerres interethniques, l’université a vu ses cadres aller exercer sous d’autres cieux.

Dans les universités de l’Afrique centrale où les professeurs titulaires se comptent sur le bout des doigts, et où les travaux de recherche sont en général sous la direction des maîtres-assistants et vacataires, on ne peut pas être étonné de leur classement médiocre sur l’échiquier continental. A l’Ecole normale supérieure de Brazzaville où j’ai exercé,  la majorité des départements compte plus de vacataires que d’enseignants titulaires. Et l’on remarque aussi que certains enseignements ne sont pas confiés à leurs spécialistes.

Les conditions de travail dans les universités de l’Afrique centrale

Les universités du Congo-Brazzaville, du Gabon, de la République centrafricaine et du Tchad ont vu le jour après la disparition de la FESAC (Fondation de l’enseignement supérieure en Afrique centrale) mise en œuvre par l’Unesco pour la formation des enseignants du secondaire de la région.

Après plusieurs décennies, ces universités restent en général marginalisées dans les programmes de développement socioculturels élaborés par les gouvernements qui se sont succédé dans cette région. Des pays comme le Gabon et le Cameroun devraient profiter de leur quiétude sociale pour revaloriser leurs universités par rapport aux autres qui ont été secoués par des guerres civiles. Mal rémunérés et travaillant dans des conditions aléatoires, les enseignants de ces pays ont eu du mal à s’extérioriser.

Les bibliothèques universitaires sont absentes et ne sont pas mises à jour quand elles existent comme au Congo-Brazzaville, Etre bien suivi dans ses travaux de recherche pour les étudiants devient une sinécure car leurs professeurs sont souvent partagés entre les classes et les bureaux de certains politiques dont ils sont des conseillers.

 Dans ces pays où les enseignants ne sont pas généralement bien payés quand on voit le travail qu’ils fournissent ainsi que leur cursus universitaire, l’on constate le départ de certains d’entre eux vers d’autres horizons plus rémunérateurs.

L’enquête faite au niveau des compétences de la diaspora de l’Afrique centrale révèle qu’il y a des universitaires bien formés et capables d’aller rehausser le niveau de formation dans leur pays. Mais se posent les conditions de travail avec des salaires qui ne permettraient pas de mener à bien leurs enseignements et recherches.

Dans ces pays, on a parfois des hommes qui n’ont que le niveau du secondaire mais qui gagnent mieux leur vie que des universitaires parce qu’acteurs politiques au pouvoir. Et cette situation n’encourage pas certaines compétences de rentrer à Ndjamena, Brazzaville, Bangui ou Libreville où ils seront plus nécessiteux que dans les pays du Nord où certains se sont donnés à des petits métiers qui leur procurent le minimum vital malgré la « mise au placard » de leurs diplômes.

Revaloriser l’université en Afrique centrale

Aucune université de l’Afrique centrale sur la liste des cent meilleures du continent et cela devrait interpeller nos décideurs politiques car ils doivent comprendre que l’éducation est l’une des conditions fondamentales pour le développement d’un pays en dehors de la santé.

Et apparaît chez nos politiques un élan égoïste quand ils préfèrent envoyer leurs enfants aller étudier dans les pays du Nord et où ils vont aussi se faire soigner au moindre mal. Les pays d’Afrique centrale ont des richesses énormes qui devraient leur permettre de reconsidérer leur système éducatif en revalorisant la condition enseignante.

Que de compétences de l’Afrique centrale devenues Français, Britanniques, Canadiens et Américains qui voudraient participer au développement de leur pays ! Mais malheureusement ils sont incompris par les dirigeants de leur pays qui ont souvent lié le tribalisme à leur vision monarchique dans la direction de l’Etat.

Les universités d’Afrique centrale, une catastrophe humanitaire quand on se réfère à la place qu’elles occupent sur le classement continental par rapport à celles de l’Afrique de l’Ouest.

Et quand on se rappelle les quelques années post-indépendances quand les étudiants de ces pays venaient se former dans des universités de l’Afrique centrale comme le Centre d’enseignement supérieur de Brazzaville qui s’est transformé en Université de Brazzaville depuis 1972. Et ces établissements de l’Afrique centrale sont maintenant classés loin derrière l’université Cheik Anta Diop (Sénégal) et l’université de Ouagadougou (Burkina Faso) qui occupent respectivement les 14è et 37è places.

À quand les richesses de l’Afrique centrale devront-elles servir grandement à la formation des cadres ainsi qu’à leur prise en charge décente et non à l’achat des armes et la corruption des acteurs politiques qui ne font qu’aggraver les malheurs des Africains de cette sous-région ? Si l’Afrique centrale néglige ses universités, elle va droit au mur : triste réalité d’une région riche qui mériterait mieux que ça de ses politiques.

 

 

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